Etude de l’ONDRP sur les viols commis à Paris en 2013-2014 : un reflet (très) partiel de la réalité

L’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) publie aujourd’hui une étude sur les viols commis à Paris en 2013 et 2014 et qui ont donné lieu à une plainte, soit un échantillon de 688 viols. Osez le Féminisme ! rappelle que moins de 10% des femmes ayant été violées parviennent à porter plainte. En effet, si les féministes ont conquis de précieuses avancées pour les victimes de violences sexuelles, dans la loi et dans les mentalités, beaucoup reste à faire pour que la libération de la parole des victimes soit encouragée, accompagnée, et préservée à l’abri des représailles.

L’enquête de l’ONDRP corrobore ce que disent toutes les associations d’accompagnement des victimes :100 % des violeurs sont des hommes, et dans plus de 86% des cas, ils font partie de l’entourage des victimes. L’étude ne portant que sur les plaintes reçues, elle sous-estime toutefois très fortement la réalité des viols, et en particulier les liens familiaux qui existent entre victime et violeur : s’il est déjà très difficile de porter plainte, ça l’est encore davantage quand il s’agit d’un proche. Rappelons que c’est au sein du foyer qu’est commise la majorité des violences patriarcales, et que seuls 12% des viols sont commis dans la rue.

Peur de ne pas être crues, mauvais accueil des forces de police peu ou pas formées, procédures judiciaires trop longues et éprouvantes, viols requalifiés en délit, peines légères pour les agresseurs : les victimes de viols hésitent bien souvent à porter plainte, et l’impunité est de mise pour les violeurs. La culture du viol est aujourd’hui très prégnante dans notre société, et le traitement médiatique évoquant la tenue des victimes ou interrogeant la question du consentement y contribue.

Viol-la-honte-doit-changer-de-camp

Face à ce crime de masse, Osez le Féminisme ! lançait en 2010 la campagne Contre le Viol – La honte doit changer de camp !, afin de libérer la parole des victimes et de demander aux pouvoirs publics de mettre en place les moyens de lutter efficacement contre ces crimes. A la lumière de cette étude, Osez le Féminisme ! relance son appel aux responsables politiques pour que prévention et la lutte contre le viol fassent enfin l’objet de mesures de grande ampleur :

– formation systématique et obligatoire des professionnel-le-s qui peuvent recueillir la parole des victimes (professionnel-le-s du travail social, forces de police et de gendarmerie, personnel médical, magistrat-e-s, enseignant-e-s) ;

– financement accru des associations spécialisées pour un meilleur accompagnement des victimes ;

– prévention dès le plus jeune âge, grâce à l’application effective de la loi 2001 prévoyant 3 séances annuelles d’éducation à la sexualité, du CP à la terminale, pour promouvoir une sexualité émancipatrice, égalitaire et libérée des violences ainsi que la mise en oeuvre d’une véritable éducation à l’égalité filles-garçons.

Osez le Féminisme ! rappelle qu’Interstat, outil de mesure de la délinquance utilisé par le Ministère de l’Intérieur, ne comptabilise plus les viols depuis octobre dernier, ce que nous déplorons. Il est indispensable de ne pas occulter ou masquer la réalité massive de ces crimes.