Communiqué de presse

Evaluation interministérielle de la loi du 13 avril 2016 : Contre les violences prostitutionnelles, la loi est efficace…quand elle est appliquée !

Osez le Féminisme ! salue la grande qualité du rapport interministériel d’évaluation de la loi du 13 avril 2016 visant à lutter contre le système prostitutionnel. Il confirme ce que les associations féministes disent depuis longtemps : la loi abolitionniste de 2016 est une loi cadre complète et ambitieuse qui fonctionne quand elle est appliquée. En particulier, elle permet de lutter efficacement contre les violences prostitutionnelles : + 54% de procédures pour proxénétisme et traite des être humain•e•s. Le rapport souligne cependant qu’un “engagement volontariste des pouvoirs publics” est plus que nécessaire, notamment plus de moyens financiers pour accompagner les personnes prostituées.

Lundi 22 juin, a paru l’évaluation interministérielle de la loi du 13 avril 2016 sur la prostitution, signée par trois inspections : Inspection Générale de l’Administration, Inspection générale de la Justice et Inspection Générale des Affaires Sociales. Basé sur 300 entretiens et sur les questionnaires adressés aux préfet•e•s, parquets et ARS ; le rapport réaffirme le caractère ambitieux et transversal de la loi : renforcement de la lutte contre le proxénétisme; accompagnement des personnes prostituées, enfin considérées comme victimes, et pénalisation des “clients” prostitueurs; prévention des IST et risques sanitaires, sociaux et psychologiques; et sensibilisation aux dangers de la marchandisation des femmes.

Les chiffres de la mission d’évaluation confortent les analyses de longue date des associations féministes abolitionnistes  : la loi est efficace quand elle est appliquée, mais la mise en oeuvre est très inégale sur le territoire et les moyens nécessitent d’être fortement augmentés 

Lutte contre le proxénétisme : En 4 ans, hausse de 54% des procédures pénales pour proxénétisme et traite des êtres humains aux fins d’exploitation sexuelle et multiplication par 7 des indemnisations des victimes du proxénétisme et de la traite. Grâce à la loi, 2,35 millions d’euros de fonds proxénètes saisis ont été réalloués à  l’accompagnement des personnes prostituées.

73% des préfet•e•s ont souligné que le parcours de sortie de la prostitution était efficace, mais en nombre insuffisant, seules 395 personnes en ont bénéficié. En effet, celui-ci nécessite un accompagnement social important, or, les moyens des associations d’accompagnement comme ceux alloués aux délégations départementales aux droits des femmes n’ont pas augmenté depuis 2016. De plus, l’autorisation provisoire de séjour de 6 mois est trop courte et le montant de l’allocation (330E) est trop faible. 

5000 “clients” prostitueurs ont été interpellés, malheureusement cette mesure est très inégalement appliquée, ainsi 50% des verbalisations concernent Paris. De plus les arrêtés municipaux contre les personnes prostituées sont à proscrire, allant à l’encontre de l’esprit de la loi qui rétablit justement la charge de la responsabilité sur le “client” prostitueur et décriminalise complètement les personnes prostituées.  

90% des préfèt•e•s jugent utile la commission départementale prévue par la loi. Celle-ci améliore la connaissance mutuelle des acteurs et la compréhension des mécanismes de violences du système prostitueur. 

40 000 personnes sont en situation de prostitution en France : 85% sont des femmes et 85% sont des étrangères. Ce chiffre est stable et à comparer avec celui de l’Allemagne (400 000 personnes prostituées !) qui a explosé depuis la légalisation des bordels en 2002. Toutefois, la prostitution des mineur.es est en hausse et la lutte contre cette pédocriminalité nécessite des actions et moyens spécifiques.

La mission formule 28 recommandations et réclame un “portage interministériel” et “un engagement volontariste des pouvoirs publics” pour un pilotage de la loi renforcé. 

Osez le Féminisme ! ne peut qu’appuyer ces 28 recommandations : davantage de moyens et plus de volonté politique pour lutter contre les violences prostitutionnelles !
Nous demandons un renforcement de la lutte contre le cyber-proxénétisme, et les réseaux criminels de proxénètes transnationaux. Nous demandons un renforcement de la lutte contre la prostitution des mineur•e•s.
Les “clients” prostitueurs doivent être rendus responsables de leurs actes pédocriminels (5 ans de prison selon la loi) et les mineur•e•s vulnérables protégé•e•s.
Nous demandons aussi plus de moyens pour l’application de cette loi d’une manière homogène sur le territoire français, ainsi que l’allongement de la durée de l’autorisation provisoire de séjour, et l’augmentation du montant de l’allocation financière des parcours de sortie. 
C’est urgent ! Avec les personnes prostituées, contre le système prostitueur !