Viols, vers la fin de l’impunité ?

Le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE), dont Osez le féminisme ! est membre, vient de publier un avis pour “une juste condamnation sociétale et judiciaire du viol et autres agressions sexuelles”. Osez le féminisme ! salue la parution de cet avis qui souligne une double urgence : mieux accompagner les femmes victimes d’agressions et de crimes sexuels et proposer des solutions pour mettre fin à l’impunité dont jouissent trop souvent les agresseurs.

Cet avis rappelle des chiffres que nous connaissons déjà : 84 000 femmes sont victimes de viols ou de tentatives de viol par an. 90% d’entre elles connaissent l’agresseur. 10% d’entre elles portent plainte. Au final, les condamnations sont marginales, face à l’ampleur du nombre de femmes victimes.

Parce que la culture du viol est encore bien ancrée en France, comme le démontre l’avis avec des exemples de publicité sexistes qui “esthétisent” des scènes de violences masculines, et parce que le système judiciaire est encore inadapté au traitement de ces agressions et crimes spécifiques, beaucoup de victimes subissent une double peine : celle d’avoir été agressée ou violée, et celle de ne pas voir son traumatisme et ses souffrances pris en compte par la société. Beaucoup d’agressions et de viols sont traités judiciairement selon le principe “parole contre parole”, un principe qui ignore complètement la stratégie de l’agresseur et les conséquences psycho-traumatiques des violences pour les victimes.

Au-delà de campagnes d’information ambitieuses et de mesures d’accompagnement des femmes victimes, l’avis du HCE propose également, à travers ses recommandations 7 à 11, d’adapter le traitement judiciaire à la réalité des agressions et viols. Ces préconisations retiennent tout particulièrement notre attention :

  • Redéfinition pénale du viol, afin de mieux prendre en compte la question du désir libre et éclairé ;
  • Instauration d’un seuil d’âge, 13 ans, en dessous duquel une personne ne peut être considérée juridiquement comme étant désirante pour une relation sexuelle. Cette mesure permettra de mieux protéger les victimes mineures (parmi les victimes, 59% avaient moins de 18 ans au moment des faits) ;
  • Allongement des délais de prescription, qui permettra de mettre fin à l’impunité des agresseurs ;
  • Interdiction de correctionnaliser le viol, c’est-à-dire de le juger en tribunal correctionnel (comme c’est souvent le cas actuellement) plutôt qu’en cours d’Assises (où il doit être jugé puisqu’il s’agit d’un crime) ;
  • Mise en oeuvre des moyens pour lutter judiciairement contre les crimes sexuels, alors que nous savons que les politiques publiques pour les droits des femmes sont sous-financées en France (rapport du 13 septembre).

L’avis du HCE est ambitieux, et nous en appelons à nos responsables politiques : êtes-vous enfin prêt-e-s à faire de la lutte contre les violences sexuelles une priorité ? Etes-vous prêt-e-s à mettre en oeuvre rapidement les recommandations du HCE ? Alors que 20% des femmes déclarent avoir été victimes d’au moins une forme de violence sexuelle au cours de leur vie, il y a urgence à agir.

Rendez-vous jeudi 13 octobre à Paris où le Collectif Féministe Contre le Viol organise, pour les 30 ans de la permanence téléphonique nationale « Viols-Femmes-Informations 0 800 05 95 95 », des grandes rencontres pour l’ensemble des militant-e-s et professionnel-le-s !