Communiqué de presse

Affaire Alexandra Richard : La cour d’appel de Rouen emprisonne les victimes

Alexandra Richard, condamnée en novembre dernier à 10 ans de prison pour avoir tué son conjoint violent, restera en prison jusqu’à sa comparution en appel le 19 octobre prochain au tribunal d’Evreux. Sa sixième demande de mise en liberté conditionnelle a été refusée par la cour d’appel de Rouen qui estime que sa libération pourrait engendrer « un trouble exceptionnel à l’ordre public » du fait de ses soutiens féministes !

Pendant trois ans, Alexandra Richard a subi de graves violences morales, physiques et sexuelles aux mains de Sébastien Gest, son conjoint à l’époque des faits. Ce dernier est allé jusqu’à la frapper dans le ventre avec son poing alors qu’elle était enceinte. Il la menaçait quotidiennement de mort, des menaces sérieuses étant donné qu’il possédait 7 ou 8 fusils au domicile, dont 1 sous le lit. De plus, il avait déjà tiré sur un homme et été incarcéré pour tentative d’homicide, gage de sa dangerosité.

Le jour du décès, Sébastien Gest a menacé de mort Alexandra Richard, ce qui l’a terrifiée. Quelques heures plus tôt, il lui avait demandé de choisir l’arme avec laquelle il allait la tuer. Elle a d’abord saisi un fusil pour le dissuader de la poursuivre. Mais il s’est précipité vers elle, a attrapé le canon de l’arme et le coup est parti. Ce tir était accidentel et la scène même relève de la légitime défense. Elle s’est déroulée dans un contexte où la violence montait crescendo et où la vie d’Alexandra et celles de ses enfants étaient en danger.

Sébastien Gest était une véritable bombe à retardement dont elle aurait dû être protégée. À la place, on lui a reprochée de s’être défendue. On l’a blâmée pour son “fort caractère”. On l’a soupçonnée d’instrumentaliser la lutte contre les violences conjugales et de se faire passer pour “l’archétype de la victime”. Lors du procès, il a suffi de dénigrer sa personnalité pour décrédibiliser sa parole, minimiser, voire nier les violences et faire disparaître l’agresseur du récit, comme par magie. Un bel exemple de victim-blaming !

Le procès en appel d’Alexandra Richard se tiendra du 19 au 21 octobre au tribunal d’Evreux. La reconnaissance des violences conjugales, la compréhension de ses mécanismes et de ses conséquences psycho-traumatiques, ainsi que la reconnaissance du principe de légitime défense pour les femmes victimes de violences conjugales seront les grands enjeux de ce procès. Il ne doit pas se réduire, comme cela a été le cas l’an dernier, à un ramassis de propos sexistes, révélateurs du mépris viscéral des femmes encore ancré dans la société.

Si la cour d’appel de Rouen n’a pas libéré Alexandra Richard, c’est parce qu’elle craint le tribunal médiatique. Or, il est essentiel que les projecteurs soient braqués sur cette affaire pour s’assurer qu’aucun déni de justice ne se produira dans l’ombre d’un tribunal et le silence des médias. Nous voulons que la vérité soit révélée lors de ce procès en appel. La vérité sur les violences intolérables que subissent les femmes dans le huis clos des foyers, la vérité sur la haine et le mépris que leur portent des agresseurs comme Sébastien Gest. C’est cette vérité-là, largement niée et occultée, que nous voulons voir éclater.

Jacqueline Sauvage, Valérie Bacot, Alexandra Richard… Combien d’autres encore, injustement placées sur le banc des accusés ?