La Saint-Valentin, le rendez-vous des clichés sexistes

Comme chaque année, le 14 février annonce le jour de la Saint-Valentin. Une fête commerciale ancrée dans la tradition du sexisme et du patriarcat.

 

Mais d’où vient cette fête ?

D’origine romaine, la Saint-Valentin faisait partie des Lupercales, fêtes païennes qui se déroulaient le 15 février en l’honneur de Faunus, défenseur des troupeaux et dieu de la fécondité. Le pape Gélase Ier instaura la Saint-Valentin le 14 février dans l’espoir d’en faire une fête religieuse. Le choix de ce nom vient d’un moine, Valentin de Terni, tué un 14 février pour avoir continué de marier des couples malgré l’interdiction de l’Empereur Claude II Le Gothique* visant à obliger les hommes à partir à la guerre. Les romains organisaient également des loteries amoureuses dont les participant·es étaient des « Valentins » et des « Valentines ». 

1 000 ans plus tard, Valentin est officiellement désigné comme le saint patron des amoureux par l’Église catholique dans le but de contrer la tradition anglaise du valentinage qui consistait à associer des couples désignés par le hasard pour une journée. Le 14 février, les jeunes femmes désignaient leurs fiancés comme leur Valentin et leur destin dépendait de l’oiseau observé : un rouge-gorge signifiait un marin, un moineau un mariage heureux mais pauvre et un chardonneret un homme riche.

La fête commerciale que nous connaissons aujourd’hui a pris son essor aux  États-Unis à la fin du XXe siècle avec la vente de cartes postales. Sous couvert de preuves d’amour, offrir bouquets de roses, gadgets ou dîners au restaurant est devenu une véritable aubaine pour les entreprises !

*L’empereur voulait interdire le mariage pour éviter que les hommes soient tentés de rester avec leurs fiancées plutôt que de partir à la guerre.

Business, sexisme et désastre écologique

L’approche de la Saint-Valentin est donc l’occasion rêvée pour les entreprises de pousser à une consommation, jugée irresponsable à l’heure du dérèglement climatique. En effet, 85% des fleurs commercialisées sont exportées de l’étranger (Kenya, Colombie, Pays-Bas, Équateur) et enregistrent un bilan carbone conséquent. Le chocolat fait aussi partie intégrante du désastre écologique et humain. L’industrie du cacao est principalement structurée autour de pratiques esclavagistes, notamment envers les enfants et d’une  déforestation des régions tropicales : les industriels détruisent les écosystèmes locaux afin de planter des plans de cacao, au détriment de la biodiversité locale. La surconsommation de bijoux, de bougies, de produits cosmétiques et de parfums engendre une dégradation des conditions de travail dans les pays exportateurs des matières premières et l’utilisation de produits chimiques dans la production ou la transformation, néfastes pour l’environnement.

À la catastrophe écologique s’ajoute la propagande d’une fête « traditionnelle » ritualisant une nouvelle norme conjugale, imposant d’afficher son amour à une date précise et de se plier à des codes et des rôles bien définis. Si l’homme doit offrir des cadeaux et des roses à sa partenaire dans un restaurant, la femme ne doit-elle pas consentir, en contrepartie, à un rapport sexuel à l’issue de ce rendez-vous « romantique » ? La Saint-Valentin exerce ainsi une pression sociale et participe au maintien de stéréotypes sexistes qui continuent de forger les mentalités et les comportements, comme en témoigne le rapport 2024 du Haut Conseil à l’Égalité sur l’état des lieux du sexisme en France : 70% des hommes pensent encore qu’un homme doit avoir la responsabilité financière de sa famille pour être respecté dans la société.

En célébrant et idéalisant l’hétérosexualité, l’hétéronormativité est devenue une réelle exigence destinée à entretenir une domination patriarcale qui rend les femmes et leurs corps, disponibles à l’appropriation masculine.  L’injonction s’opère dès le plus jeune âge, par sacralisation du désir masculin, une sociabilisation qui efface le désir féminin et invisibilise l’amour entre femmes. Diffuser ces stéréotypes contribue à la reproduction de schémas genrés qui renforcent les inégalités et les privilèges. Ils poussent à l’exclusion et jouent sur les discriminations. Selon le rapport annuel du HCE sur le sexisme en France*, 9 femmes sur 10 déclarent avoir subi une situation sexiste et 37% d’entre elles déclarent avoir vécu une situation de non-consentement, un chiffre qui grimpe à plus de 50% chez les 25-34 ans.

*Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes, rapport annuel 2024 sur l’état des lieux du sexisme en France, S’attaquer aux racines du sexisme.

Osez le Féminisme ! et ses actions
Osez le Féminisme ! se mobilise sur différents fronts pour lutter pour la libération des femmes de l’emprise patriarcale. En effet, Osez le Féminisme ! se compose de plusieurs groupes thématiques :
  • Le groupe Féminisme antiraciste travaille sur les sujets en intersection entre féminisme et racisme
  • Le groupe Féminisme et Justice se consacre aux dysfonctionnements de la chaîne judiciaire relatifs aux violences sexistes et sexuelles
  • Le groupe Féminisme, Écologie, Climat vise à montrer l’interdépendance entre les droits des femmes et la préservation du climat et de la terre mais aussi à faire connaître des mouvements de femmes qui ont milité ou militent toujours pour l’écologie et le climat.
  • Le groupe Abolition développe des argumentaires abolitionnistes pour dénoncer les violences sexuelles que sont la prostitution et la pornographie, et lutter contre toutes les formes de marchandisation du corps des femmes. Il est à l’origine des dernières campagnes de sensibilisation « Puis le porno est entré dans ma vie » et « Balance ton porn » qui retracent les effets de l’exposition et de la consommation de la pornographie sur la vie des femmes à travers de nombreux témoignages, ainsi que ses impacts sur la société.
Osez le Féminisme ! s’appuie sur ces groupes pour organiser mensuellement des réunions publiques appelées FéminisTalks.
Osez le Féminisme ! se bat aussi sur le front juridique. L’association est partie civile dans l’affaire dite « French Bukkake » dans laquelle dix-sept hommes sont mis en examen pour viols aggravés, proxénétisme aggravé, traite des êtres humains ou actes de torture et de barbarie. Ils sont soupçonnés d’avoir participé à un système permettant de piéger, manipuler et violenter des femmes dans le cadre de « tournages » pornographiques et de diffuser sans limite les vidéos des violences sexuelles contre leur gré. Ce sont les pratiques criminelles de toute l’industrie pornographique française qui sont dévoilées par ces procédures judiciaires. Le procès aura lieu en 2024. Osez le Féminisme ! propose à une cinquante de victimes un accompagnement juridique, psychotraumatologique et social pour les aider à se reconstruire et à affronter le parcours de la combattante qu’est l’épreuve judiciaire.